Le trouble du spectre de l’autisme (TSA) atteint les enfants sans discrimination de nationalité, de statut socioéconomique ou de sexe. Toutefois, il existe bel et bien des différences culturelles dans les façons qu’ont les différentes sociétés d’appréhender ce trouble du développement humain, caractérisé par des difficultés de l’apprentissage social et de la communication. C’est d’ailleurs cet enjeu culturel qui pousse l’étudiante gabonaise Christel Nadine Nguema-Ndong, doctorante en psychoéducation à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), à voir si les façons de faire québécoises en matière de soutien aux parents d’enfants ayant un TSA sont applicables à la réalité de son pays natal.
Arrivée à l’UQTR en 2016 dans le cadre du partenariat avec l’Institut national de formation d’action sanitaire et sociale (INFASS) au Gabon, Christel mène un projet de thèse, sous la direction des professeures Line Massé et Annie Paquet du Département de psychoéducation, dont l’objectif vise la validation transculturelle d’un programme d’entraînement parental adressé aux parents d’enfants gabonais ayant un TSA.
Si, au Gabon, l’État dispose des structures afin de prendre en charge les enfants ayant un TSA, leurs parents, impuissants, sont souvent laissés à eux-mêmes avec leurs peurs, leur détresse et leurs croyances. «Ils ont peu de soutien pour faire face aux défis d’élever un enfant autiste, du fait que la structure publique de l’État ne leur vient pas en aide. Les parents ne savent pas vraiment ce qu’est le TSA et, souvent, ils vont chercher une explication dans une cause mystico-religieuse. On observe également que l’enfant ayant un TSA peut être victime de marginalisation dans la famille», explique la doctorante, qui œuvre au Gabon comme travailleuse sociale spécialisée dans la formation et la réinsertion des personnes handicapées.
Celle qui détient une maîtrise en supervision et formation de l’INFASS ajoute : «On ne peut toutefois pas aller à l’encontre des croyances des personnes, de la culture d’une société. Mais au-delà des particularités culturelles, il y a des enjeux universels. Le fait d’être confronté à un TSA dès les premières années de vie de son enfant, de se sentir démuni face aux nombreux comportements atypiques et de s’adapter à la suite de l’annonce du diagnostic sont des étapes communes à tous les parents du monde.»
Un programme québécois pour le Gabon
L’idée de Christel est donc de venir en aide aux parents gabonais grâce au programme québécois Au-delà du TSA : des compétences parentales à ma portée, et de voir comment celui-ci pourrait être implanté dans son pays. Ce programme reconnaît les parents comme acteurs centraux dans le développement de leur enfant, et il propose de les amener à reconnaître, développer et actualiser leurs compétences parentales.
Le cœur du programme s’appuie sur cinq rencontres thématiques, durant lesquelles sont abordés les sujets suivants : caractéristiques spécifiques de l’enfant sous l’angle du TSA; processus d’adaptation du parent à la suite de l’annonce d’un diagnostic de TSA; communication et relations sociales; importance d’offrir un environnement structuré à l’enfant; émotions et perceptions qui influencent la vie du parent.
Lorsqu’elle aura validé si le modèle québécois peut s’appliquer à la société gabonaise, Christel devra entamer le travail de terrain au Gabon : implanter correctement le programme, former les intervenants, trouver du financement, etc. Même si toute cette logistique comporte son lot de défis, elle sait que ce programme pourrait faire une grande différence dans la vie de ces enfants et de leurs parents.
Les origines du programme
Originalement nommé Au-delà du TED : des compétences parentales à ma portée, le programme a été développé en 2004 et pré-expérimenté en 2008 au Centre de réadaptation en déficience intellectuelle et en troubles envahissants du développement de la Mauricie et du Centre-du-Québec — Institut universitaire (CRDITED MCQ – IU), maintenant intégré au Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec (CIUSSS MCQ).
Puis, le programme a été appliqué dans trois sites, soit Mauricie et Centre-du-Québec, Chaudière-Appalaches et Québec, sur une période de 18 mois, d’avril 2014 à octobre 2015.
Récemment, une équipe de recherche, au sein de laquelle a participé la professeure Annie Stipanicic du Département de psychologie de l’UQTR, a procédé à l’évaluation de la fidélité de son implantation, de même qu’à la mesure de ses effets. Leur rapport, intitulé Évaluation de la fidélité d’implantation et des effets du programme « Au-delà du TED : des compétences parentales à ma portée » (Stipanicic, A., Couture, G., Rivest, C., Rousseau, M.), a été déposé en janvier 2017.