Au Québec, les microbrasseries incarnent la passion des personnes qui les font vivre. Cette fougue se traduit souvent par le caractère artisanal des bières qu’elles développent. Résolument authentiques, certains établissements connaissent un tel succès qu’ils doivent trouver des moyens de gérer leur croissance. Afin de répondre à la demande, cinq microbrasseries ont choisi de produire à Boucherville, dans les installations du Collectif brassicole Ensemble. Fort de sa capacité industrielle, ce dernier permet aux brasseurs d’augmenter leur volume, et de voir le fruit de leur labeur occuper une plus grande part de marché.
En tant que directeur des opérations du Collectif, Alexandre Laforest est véritablement dans son élément. Diplômé du baccalauréat en administration des affaires (cheminement DEC-BAC en marketing Édouard-Montpetit), cet ancien de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) a fait ses études au Centre universitaire de Longueuil. Et il n’a pas perdu de temps avant de mettre ses apprentissages en pratique.
« Après avoir terminé mes études en 2017, j’ai travaillé pendant un an et demi dans le domaine de la quincaillerie, au siège social de BMR. J’étais acheteur pour les produits horticoles, les vêtements de travail, les équipements de sécurité et le matériel acéricole. Ensuite, j’ai été à l’emploi d’une agence de marketing Web pendant environ un an. Toutefois, lorsque la COVID est arrivée, mon employeur a dû mettre un terme à mon contrat. Comme le domaine de la bière m’a toujours intéressé, j’ai profité de cette période pour suivre une formation à l’Institut Brassicole du Québec. Puis, en octobre 2020, j’ai obtenu un poste de brasseur ici au Collectif », raconte Alexandre.
« Quand je suis arrivé, j’ai constaté qu’il manquait beaucoup de planification. Nous avons beau évoluer dans la sphère de la microbrasserie, nous opérons des installations qui sont de l’ordre d’une usine. Heureusement, la logistique fait partie des forces que j’ai développées pendant mon parcours en administration. Je me suis imprégné de l’entreprise, et j’ai commencé à toucher aux achats et à la planification. En un peu plus d’un an, j’ai été promu acheteur, puis planificateur, avant d’être nommé directeur des opérations en janvier 2022. C’est ça, les joies d’une PME ! », ajoute-t-il.
Une organisation en développement
D’abord connu sous le nom de « New Deal », le Collectif a démarré ses activités en 2016 avec la marque Boldwin. Connaissant des débuts mitigés, un changement dans l’actionnariat vient donner un coup de barre à l’organisation, qui adopte en 2017 le nom de Collectif brassicole Ensemble. L’expérience et l’implication des nouveaux dirigeants ouvrent alors la voie à des jours plus prometteurs.
« À la suite de cette réorientation, la microbrasserie Vagabond a intégré le Collectif. Puis, entre 2018 et 2019, ce fut au tour de LOOP Mission et Des Cantons de nous rejoindre. On connaît bien LOOP pour ses jus, mais ils se sont aussi lancés dans la création de bières. Et depuis le début de 2022, la Memphré a fait son entrée comme cinquième brasserie du Collectif. C’est assurément notre membre qui a le plus d’histoire », énumère Alexandre.
Si la Memphré a pris cette direction, c’est d’abord parce que la microbrasserie faisait face à des enjeux de capacité. Avec le succès grandissant de son brewpub, sa production de cannettes devenait insuffisante pour alimenter ses distributeurs de manière constante. Les ressources du Collectif ont permis de pallier cet enjeu, et l’entreprise de Magog a pu se tailler une place sur les tablettes des commerçants.
« En gros, c’est ce que nous faisons pour chacune de nos brasseries membres. Or, ce qu’il y a de particulier avec notre modèle d’affaires, c’est qu’il n’y a pas de contrats de brasse. Chaque partenaire demeure responsable de son image de marque et de ses recettes. Nos brasseurs et nos ingénieurs brassicoles sont là pour les accompagner dans la démarche, afin que la bière brassée dans nos installations corresponde au produit initial. Mais chacun conserve son identité propre », souligne Alexandre.
Le Collectif propose une formule qui couvre l’ensemble des étapes de production. Il commande les matières premières, procède au brassage, effectue les suivis de fermentation, et assure la mise en cannettes ou en fûts, incluant l’étiquetage. L’organisation s’occupe également de la distribution, des ventes, des relations client, etc.
Trouver sa voie… et en tirer le maximum !
Avant d’entamer son parcours en marketing, Alexandre poursuivait des études collégiales en sciences de la nature. Élève performant au secondaire, il avait dû ajuster sa méthode d’apprentissage lors de son entrée au cégep, en s’investissant davantage dans ses cours. S’il se démarque en mathématiques, il réalise rapidement que les sciences, comme la chimie et la physique, ne le passionnent pas au point d’en faire une carrière. Après trois sessions, il décide de tenter sa chance du côté des programmes d’administration.
« Le Cégep Édouard-Montpetit, où j’étudiais à l’époque, proposait la formule DEC-BAC en partenariat avec l’UQTR. Cela m’intéressait beaucoup, parce qu’avec les sessions d’été, l’obtention du baccalauréat prenait une année de moins. De plus, j’ai entendu beaucoup de bons commentaires sur le programme, surtout de la part de mon cousin ; il avait été de la première cohorte du DEC-BAC en comptabilité du Centre universitaire de Longueuil. Et quand j’ai vu qu’il existait une concentration en marketing, j’ai su que c’était pour moi », évoque-t-il.
En fait, ce cheminement plaît tellement à Alexandre qu’il finit par s’impliquer dans diverses sphères de la vie parascolaire. Il agit notamment à titre de chargé de projets pour l’Association générale des étudiants hors campus, et copréside le volet local de l’Association à Longueuil. Il organise également plusieurs activités, et participe à la création des Jeux collégiaux du commerce.
Taillé pour développer
La passion qu’Alexandre a cultivée pour le marketing lui permet aujourd’hui d’occuper un emploi où ses talents sont mis à contribution. S’il œuvre pour le Collectif, il doit néanmoins travailler avec cinq microbrasseries tout en respectant l’ADN de chacune.
« Avec Boldwin, c’est la culture et la production biologique locale qui prédominent. Du côté de Vagabond, on mise sur un lifestyle et un historique de produits classiques qui ont fait leurs preuves sur le marché. Des Cantons a développé une image très sportive, axée sur le plein air. La Memphré, elle, mise sur un portefeuille de bières un peu plus éclectique. Pour ce qui est de LOOP, l’identité est intimement liée à sa mission, c’est-à-dire la valorisation des fruits et légumes imparfaits. Conséquemment, leurs bières sont brassées à partir de pains rassis. J’ai donc la chance de pouvoir naviguer dans un environnement varié sur le plan du marketing et des produits. Toutefois, nous travaillons les images séparément, dans un objectif commun de produire nos bières avec des fournisseurs locaux », indique-t-il.
Avant de conclure, Alexandre rappelle que le Collectif brassicole Ensemble a aménagé une boutique et un petit salon de dégustation dans ses locaux de Boucherville. Une douzaine de lignes de fûts permettent ainsi aux visiteurs de goûter différents échantillons. L’entreprise travaille également au développement d’un système de « club Voisin », afin d’offrir des rabais aux gens de la région.