Se rendre à l’école fait partie de la réalité quotidienne des étudiants. Même après la graduation, les déplacements professionnels continuent de ponctuer la routine des diplômés. Si tout le monde va quelque part, pourquoi ne pas repenser la mobilité pour la rendre plus saine ? C’est justement l’idée derrière le transport actif.
« Cette façon de se déplacer a des effets positifs sur la santé. On sait que près de la moitié de la population est sédentaire, et le transport actif peut diminuer les mortalités associées à cet enjeu. Le transport actif permet aussi d’aborder d’autres problèmes, comme la pollution et les embouteillages », explique François Trudeau, professeur au Département des sciences de l’activité physique de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR).
Différentes études ont recensé plusieurs déterminants individuels, sociaux, environnementaux et politiques qui influencent la pratique du transport actif.
Commencer tôt
Dans le cadre d’une collaboration avec des collègues de l’Institut de recherche du Centre hospitalier pour enfants de l’est de l’Ontario et l’Université de la Colombie-Britannique, l’équipe de l’UQTR a observé les pratiques de transport actif de 1699 élèves avec la contribution de 37 écoles au total, dont une douzaine d’écoles primaires de la région.
« Grâce aux données amassées, nous avons pu confirmer que la distance entre la maison et l’école est un facteur déterminant. On peut aussi retenir que les conditions météorologiques, le sexe des élèves et les politiques scolaires influencent la façon de se transporter », souligne Sébastien Blanchette, doctorant en psychologie.
« Les facteurs familiaux ne sont pas non plus à négliger. Les parents n’accordent pas tous le même degré d’autonomie à leurs enfants. Ainsi, des parents peuvent aller les reconduire systématiquement à l’école même si le trajet à faire à partir de la maison est très court. Il faut donc amener les parents à laisser une certaine autonomie à leurs enfants tout en s’assurant que le trajet est sécuritaire », ajoute M. Blanchette.
M. Trudeau avance également que « l’école de quartier » favorise le transport actif. Une thèse que corrobore le doctorant en psychologie.
« Dans l’étude pancanadienne, nous avons remarqué que les écoles construites dans des quartiers avec une prédominance de résidences ou de logements familiaux avaient les taux les plus élevés de transport actif. Par contre, pour les écoles avec des programmes particuliers ou certaines écoles privées, le taux de transport actif pouvait être aussi bas que 5 % », témoigne-t-il.
Bâtir un monde meilleur, littéralement
Dans un autre projet dirigé par les professeurs Denis Leroux et Lyne Cloutier, il a été constaté que l’environnement bâti influence grandement les habitudes de déplacement.
« Nous avons comparé les caractéristiques physiques des voies de circulation dans deux quartiers de Trois-Rivières. Nos résultats indiquent que la présence d’infrastructures pour piétons, l’esthétique du paysage ainsi que les mesures visant à réduire les dangers de la circulation étaient associées à la marche chez les adultes », mentionne M. Blanchette.
« Si les gens habitent à proximité d’une piste cyclable, ils vont l’utiliser. D’ailleurs, on a vu que l’annonce du lien cyclable sur la rivière Saint-Maurice a suscité beaucoup d’enthousiasme dans la population », renchérit M. Trudeau.
Insistant sur l’importance des infrastructures, le professeur soutient qu’un aménagement adéquat peut même contribuer à la pratique du transport actif en contexte hivernal.
Entre les mains des décideurs
Miser sur la marche et le vélo peut s’avérer judicieux pour les municipalités. Or, toutes ne se sentent pas également prêtes à faire le grand saut.
« Avec le support de Québec en Forme, nous avons réalisé une étude auprès des maires, des directeurs généraux et des urbanistes de plusieurs municipalités pour évaluer leurs connaissances, leurs perceptions et leurs intentions et actions par rapport au transport actif. Les résultats de ce travail, que j’ai réalisé sous la supervision des professeurs Marie-Claude Rivard, Jean Lemoyne et François Trudeau, et qui a été publié dans le Journal of Transport Health, indiquent qu’il y a plusieurs différences entre les dirigeants des milieux ruraux et urbains, notamment en lien avec le sentiment d’efficacité et le nombre d’actions posées », affirme M. Blanchette.
« Le mieux pour les dirigeants municipaux, c’est d’y aller graduellement avec de petits projets pour se donner confiance », indique M. Trudeau. « Par exemple, ils peuvent craindre que cela nuise au commerce dans les centres-villes. Pourtant, dans des villes comme Minneapolis et Calgary, c’est le phénomène inverse qui s’est produit. Le transport actif libère de l’espace à la fois pour les citoyens et pour les touristes, tout en rendant les centres-villes plus agréables et sécuritaires », conclut-il.