Dominer son sport est déjà un exploit en soi. Mais poursuivre ses études tout en demeurant sur la première marche du podium, cela témoigne d’une volonté exceptionnelle. Déterminée à atteindre les plus hauts sommets, Laurence Vincent-Lapointe est actuellement sur une lancée des plus fulgurantes.
De retour d’un très prolifique voyage à Gainesville, au nord d’Atlanta, Laurence laisse transparaître un optimisme à toute épreuve. Lors des essais nationaux de l’équipe canadienne, la canoéiste de 25 ans a écrasé les records qu’elle avait elle-même établis au cours de la saison précédente.
« Je suis super excitée ! Je suis assez fière de moi, car je n’ai jamais été aussi rapide. En plus, je pense que ça va s’améliorer encore d’ici les Jeux olympiques. Je suis très fébrile à l’idée d’aller plus vite, plus vite chaque fois », lance-t-elle avec aplomb.
Laurence avoue avoir ressenti un certain stress avant de prendre le départ. Ses efforts lors du camp d’entraînement semblent toutefois l’avoir aidée à performer, au-delà même de ses espérances. Elle a ainsi abaissé trois marques mondiales, retranchant quatre secondes en 500 m double, et trois secondes en 500 m individuel.
« Après la compétition à laquelle je viens de participer, je suis tellement satisfaite de ce que j’ai accompli ! J’ai hâte de retourner courser et d’essayer d’aller encore plus vite. Je veux voir jusqu’où je peux repousser mes limites », mentionne l’étudiante au baccalauréat en sciences infirmières.
Ramer avec fougue… jusqu’à Tokyo !
En juin 2017, le Comité international olympique a confirmé que le canoë féminin ferait partie des épreuves présentées aux Jeux olympiques de 2020. Une première dans l’histoire des Jeux. Évidemment, l’idée de prendre la route de Tokyo pousse Laurence à ramer comme jamais auparavant.
« L’an dernier, lorsque j’ai vu que j’étais capable de faire des records du monde, ça a vraiment décuplé ma motivation. Je veux être la première femme à remporter une médaille dans les épreuves de canoë féminin. Si je ne mets pas tous les efforts nécessaires pour y aller, je ne me le pardonnerais jamais », atteste-t-elle.
Bien entendu, l’objectif olympique implique un entraînement rigoureux, qui occupe une place importante de la vie des athlètes. En ce qui concerne le programme de Laurence, il combine la rame, la course, la musculation (jusqu’à quatre fois par semaine), le ski de fond et la natation. Elle s’entraîne ainsi deux ou trois fois par jour, et même quatre lors de la saison estivale. Laurence remarque cependant que ses efforts en valent la chandelle.
« Quand tu es un sprinter, tu essaies de retrancher des centièmes, voire des millièmes de seconde. Moi, j’ai fait 45,3 secondes, alors si je réussis à descendre sous les 45 secondes, je vais être heureuse. Ça peut sembler peu, mais pour moi c’est très significatif », indique-t-elle.
La rançon de la gloire
PERFORMANCES EN CHAMPIONNATS DU MONDE | |||
Année | Lieu de la compétition | Épreuve | Médaille |
2010 | Poznan, Pologne | C-1 200 m | Or |
2010 | Poznan, Pologne | C-2 500 m | Or |
2011 | Szeged, Hongrie | C-1 200 m | Or |
2011 | Szeged, Hongrie | C-2 500 m | Or |
2013 | Welland, Ontario, Canada | C-1 200 m (U-23) | Or |
2013 | Duisbourg, Allemagne | C-1 200 m | Or |
2013 | Duisbourg, Allemagne | C-2 500 m | Or |
2014 | Moscou, Russie | C-1 200 m | Or |
2017 | Racice, République tchèque | C-1 200 m | Or |
2017 | Racice, République tchèque | C-2 500 m | Or |
En 2015, malgré une victoire aux Jeux panaméricains de Toronto, Laurence a terminé quatrième aux championnats du monde de canoë. De son propre aveu, cette défaite l’a amenée à se remettre en question.
« Ça a été un choc, au point où ma motivation a été affectée. Je me demandais si j’étais encore dans le coup, je doutais de mes compétences en canoë. L’année suivante, en 2016, c’était une année olympique, donc il n’y avait pas de championnats du monde. J’en ai profité pour prendre du repos et pour retourner aux bases », confie-t-elle.
La suite des choses allait heureusement lui permettre de tourner la page. Lors de la saison 2017, Laurence a recommencé à accumuler les victoires, brisant au passage deux records du monde (ceux-là mêmes qu’elle vient de battre aux essais canadiens).
« Ça a vraiment augmenté ma confiance, parce que je me suis rendu compte que je n’en avais pas perdu. J’ai seulement eu une mauvaise course en 2015. Je sais que je suis encore là, que je suis encore capable de performer et que je suis encore capable de gagner », affirme-t-elle.
La canoéiste assure toutefois qu’elle ne tient rien pour acquis. Elle révèle qu’en compétition, son niveau de stress atteint des sommets ridicules. Le fait d’être première au monde lui apporte en effet une pression supplémentaire, puisqu’elle est la femme à battre dans sa discipline. Non seulement Laurence doit-elle satisfaire des attentes élevées, elle ressent aussi le stress d’être une pionnière.
« J’ai la pression de prouver au monde ce que les femmes peuvent faire en canoë. Je dois montrer à quel point on peut bien ramer, à quel point on peut aller vite, et à quel point on mérite notre place aux Jeux olympiques », souligne-t-elle.
Laurence, l’étudiante
Déjà détentrice d’un baccalauréat en sciences biomédicales, Laurence vient de compléter la deuxième année du baccalauréat en sciences infirmières de l’Université du Québec à Trois-Rivières. Si elle cumule les formations en santé, c’est dans l’espoir de pouvoir un jour intégrer un programme de médecine.
« Déjà vers cinq ou six ans, je disais que je voulais être médecin. Les sciences de la santé m’ont toujours beaucoup intéressée, parce que j’aime comprendre le fonctionnement du corps humain », explique-t-elle.
La canoéiste a cependant mis cette aspiration de côté pour le moment, puisqu’elle se consacrera à son sport jusqu’aux prochains Jeux olympiques. À ce sujet, Laurence note que lorsqu’elle passe davantage de temps à s’entraîner, cela paraît sur ses résultats.
« Avant, je m’entraînais davantage dans les installations locales, et je partais moins en camp d’entraînement. Cela faisait en sorte qu’en compétition, j’étais bonne, mais pas à mon meilleur. Cette session-ci, à la demande de l’équipe nationale, et avec l’approbation de mes professeurs, je suis partie trois mois au camp d’entraînement. Bref, ce n’est pas toujours facile de concilier sport et études, mais j’ai passé ma vie à trouver l’équilibre entre les deux, donc je suis habituée à jongler », commente-t-elle.
Fait intéressant, la formation en santé de Laurence lui procure un avantage sur les autres athlètes. Les sportifs de haut niveau sont suivis par une panoplie de spécialistes (préparateurs physiques, nutritionnistes, psychologues, etc.) qui encadrent de nombreux aspects de leur routine. Grâce à ses connaissances, Laurence est en mesure de comprendre les recommandations qui lui sont faites. Elle a ainsi besoin d’un minimum d’explications, et n’a aucun mal à trouver la motivation pour respecter les strictes exigences de la performance sportive. Avec un tel parcours, il se pourrait bien que Laurence détienne une recette gagnante !