Le programme de bourses canadiennes du jubilé de la reine Élisabeth II (BRE) offre à des étudiantes et étudiants de haut niveau, du Canada et d’ailleurs, de parfaire leur formation universitaire en diversifiant leurs horizons, en développant leur autonomie et en renforçant leur leadership. L’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) accueille depuis 2015 dix boursières et boursiers au niveau doctoral en provenance de l’Inde, dont Mme Viney Dixit, qui est la première de cette cohorte à obtenir son doctorat en sciences de l’énergie et des matériaux, sous la supervision du professeur Jacques Huot. Depuis l’automne 2018, une nouvelle cohorte de cinq étudiantes et étudiants indiens ont entamé leurs études doctorales à l’UQTR avec cette bourse.
Q. Qu’est-ce qui explique qu’en tant qu’étudiante internationale, avec tous les défis d’adaptation que cela suppose, tu as réussi à compléter ton doctorat en trois ans seulement ?
R. Je donne pour ça 100 % du crédit à mon superviseur, le professeur Jacques Huot. Ce n’est pas de la flagornerie, tous ses étudiants vous le diront : Jacques est disponible, ses attentes envers ses étudiants sont claires, il s’efforce de nous rassurer et de nous mettre à l’aise. C’est très motivant comme environnement de recherche ! Et je me donne 100 % aussi à moi-même… car c’est vrai que j’ai été très disciplinée et très concentrée sur mon projet de doctorat, durant ces trois années.
Q. Mis à part l’obtention de ton doctorat, quels seraient tes grands apprentissages en tant que boursière au Canada ?
R. Venir au Canada était vraiment une grande aventure pour moi ! À mon arrivée, j’étais plutôt timide, et je me suis rendu compte que j’étais très dépendante de ma famille. Alors à mon arrivée au Canada, à Trois-Rivières, sans repères et sans amies, j’ai dû apprendre à devenir autonome et à foncer. Je me suis surprise moi-même à prendre la parole en public pour expliquer mes recherches, chose que je n’aurais jamais osé faire chez moi. J’ai aussi eu la chance de côtoyer d’autres étudiants de partout dans le monde à l’Institut de recherche sur l’hydrogène (IRH). Ça m’a permis de comprendre que tout le monde a ses propres défis, et qu’ici à l’UQTR on nous laisse beaucoup d’autonomie pour démontrer notre potentiel.
Q. Ce dont tu es le plus fière ?
R. Lorsque j’ai été invitée à présenter l’affiche scientifique de mes recherches à un colloque à Boston en 2017. Il y avait beaucoup d’exposants, mais on a insisté pour que je présente mes recherches. J’ai été la seule qui ait réussi à synthétiser mes recherches dans le temps donné pour chaque exposant. Mon superviseur m’a félicitée d’avoir si bien communiqué devant tout le monde, dans une langue qui n’est pas la mienne !
Q. Ce qui a été le plus difficile pour toi ?
R. Ma famille m’a manqué beaucoup, et mes amies. C’est un grand défi, au début, d’arriver seule ici et de devoir presque tout apprendre.
Q. Qu’est-ce qui t’a le plus marquée du Canada ?
R. Le sentiment de sécurité, surtout pour les femmes. La place que prennent les femmes aussi dans toutes sortes de métiers. Lorsque je suis montée dans l’autobus pour venir à l’UQTR, j’ai eu un choc en voyant que c’était une femme qui conduisait ! En Inde, cela serait impossible ! Ça m’a impressionnée, car les gens ici ne semblent pas juger les choix que font les femmes dans leur vie. En Inde, c’est parfois difficile pour les femmes de mener des recherches en science fondamentale, pour le simple fait qu’on ne peut pas rester très tard dans les laboratoires… sinon, il faut toujours demander à un collègue masculin de nous raccompagner. Alors qu’ici, je pouvais faire les manipulations plus complexes qui prennent du temps, sortir passé 22 h du labo, et rentrer chez moi en sachant qu’il n’allait rien m’arriver. Ce sentiment de sécurité, c’est vraiment un atout majeur pour que les femmes prennent une place égale aux hommes, en science.
Q. Ce qui t’a manqué le plus de l’Inde ?
R. Question facile : les plats indiens vendus dans les rues de ma ville !
Q. Quels sont tes projets, maintenant ? Tes perspectives de carrière ?
R. Je veux vraiment continuer en recherche, dans le domaine des énergies propres. Ça va me permettre de continuer à collaborer avec le professeur Huot et l’UQTR, en restant dans le même domaine. Pour obtenir une bonne position en Inde en recherche, je dois maintenant trouver des opportunités pour faire une ou deux années de recherches postdoctorales. La compétition est féroce pour travailler en recherche ! J’ai déjà envoyé des propositions à des chercheurs que j’ai connus durant mes études, au Canada, au Royaume-Uni et en Inde… je me croise les doigts !
Q. Un mot de la fin ?
R. Mon mot de la fin irait à toutes les filles en recherche en Inde : vous devez vraiment appliquer sur les opportunités de bourses internationales ! Ne soyez pas timides, ne pensez pas que c’est pour les autres… en fait, n’y pensez pas à deux fois et appliquez ! Vous apprendrez tellement sur vous-mêmes et sur le reste du monde… ne laissez pas votre entourage ou vos craintes vous décourager. Vous ne le regretterez vraiment pas !