Fondé il y a trois ans à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), le Laboratoire des matériaux avancés pour l’énergie et de l’environnement, dirigé par le professeur Phuong Nguyen-Tri, ne cesse d’enchaîner les succès. Rattaché au Département de chimie, biochimie et physique et à l’Institut d’Innovations en Écomatériaux, Écoproduits et Écoénergies à base de biomasse (I2E3), celui-ci a accumulé dernièrement 909 000 $ en subventions pour mener à bien quatre projets distincts.
Valoriser le CO2
Actif dans le développement d’un axe de recherche sur la biomasse, M. Nguyen-Tri est en train de mettre en place une véritable chaîne de conversion. Au départ, le professeur a constaté que les matériaux à base de carbone présentaient beaucoup d’impuretés lorsqu’ils étaient extraits de manière conventionnelle.
« Les dérivés du carbone issus de l’activité minière contiennent une certaine proportion d’autres minéraux, comme la silice ou le calcium ; le problème étant que dans certains domaines, comme la production de batteries, il faut atteindre un certain seuil de pureté. Au-delà de tout ça, nous avions aussi la préoccupation de développer des matériaux plus verts et renouvelables. Nous avons donc utilisé des rejets de biomasse (fibres naturelles, carton, etc.) pour préparer des catalyseurs. Grâce à ceux-ci, nous pouvons générer une réaction de conversion du CO2 en produits carboniques à valeur ajoutée », explique-t-il.
Ayant établi un partenariat avec Electro Carbon, une entreprise spécialisée dans la conversion du CO2, l’équipe de M. Nguyen-Tri a reçu le mandat de fabriquer un nouveau catalyseur à base de biomasse en vue de son utilisation dans un procédé d’électro réduction du CO2 qui permettrait de produire un sel de formate « vert ».
« Le sel de formate est utilisé dans de nombreuses applications industrielles et possède un vaste marché mondial. Electro Carbon développe actuellement un procédé électrochimique qui permettrait de remplacer les méthodes de production conventionnelles, émettrices de CO2, par son procédé novateur et breveté. Les prochaines étapes nous permettront de collaborer avec l’entreprise afin de préparer des essais à l’échelle d’un laboratoire. Éventuellement, nous estimons pouvoir proposer un projet pilote, qui mènera à un modèle industriel », évoque le professeur.
Ces projets reçoivent l’appui financier de l’entreprise Electro Carbone, ainsi que des organismes Innovation et Développement économique Trois-Rivières (IDE Trois-Rivières) et MITACS, pour un montant total de 510 000 $. De plus, IDE Trois-Rivières participera à la mise en place d’installations physiques liées au projet sur le territoire de la municipalité.
Des montants supplémentaires pour appuyer Hydro-Québec
Déjà impliqués dans des travaux sur les entretoises-amortisseurs des lignes de transport d’Hydro-Québec, M. Nguyen-Tri et ses collaborateurs avaient reçu au cours de l’automne 722 000 $ en subventions et équipement pour améliorer la résistance du réseau de la société d’État (en collaboration avec Hélix Uniformé Ltée). À ce montant s’ajoute désormais une subvention de 387 114 $ octroyée par le ministère de l’Économie et de l’Innovation par l’intermédiaire de PRIMA Québec.
Créé en 2014 à l’initiative du gouvernement du Québec, cet organisme a le mandat d’animer et de soutenir l’écosystème des matériaux avancés en privilégiant l’innovation collaborative pour le développement économique du Québec. Reconnu comme regroupement sectoriel de recherche industrielle (RSRI), PRIMA Québec bénéficie du soutien financier du gouvernement du Québec et du secteur privé pour favoriser les relations recherche-industrie selon l’approche de l’innovation collaborative.
« Ces montants supplémentaires vont nous permettre de recruter un nouvel étudiant, qui travaillera sur la simulation du comportement du matériau face aux intempéries. Cela nous permettra aussi de faire des analyses plus approfondies », commente le professeur.
Ce dernier se dit d’ailleurs très content d’avoir la confiance d’Hydro-Québec pour résoudre les défis à moyen et à long terme en lien avec la durabilité des matériaux utilisés dans les grandes lignes de transports électriques.
Des collaborations avec le Vietnam
Le quatrième projet pour lequel M. Nguyen-Tri a remporté des fonds relève d’un appel à projets du ministère des Relations internationales et de la Francophonie, dans le cadre de son programme de coopération bilatérale Québec-Vietnam 2021-2023. Ce financement vise à encourager l’établissement de nouveaux liens entre l’UQTR et la Duy Tan University à Danang, au Vietnam, leur permettant de mettre en œuvre un projet de coopération en recherche dans le développement des énergies renouvelables.
« Les montants attribués par le ministère servent à couvrir les dépenses admissibles comme les déplacements. Cela nous permet par exemple d’organiser des conférences internationales comme la série des conférences M2EBA. Nous aurons également l’opportunité d’accueillir des stagiaires, donc cela renforce le positionnement international de notre université », note le professeur.
Multiplier les ententes
M. Nguyen-Tri ne s’en cache pas : ses collaborateurs et lui-même sont privilégiés de se voir accorder toutes ces subventions. Il estime cependant que cette confiance est méritée, puisque son équipe est particulièrement active dans l’établissement de nouveaux partenariats. Reconnaissant envers ses associés actuels, le professeur en profite également pour inviter les acteurs industriels et les organismes subventionnaires à tisser d’autres ententes avec lui et ses collègues chercheurs.
Par ailleurs, le succès du laboratoire de M. Nguyen-Tri trouve aussi écho au sein des hautes instances de l’Université. Le doyen de la recherche et de la création de l’UQTR, Jean-François Millaire, reconnaît la contribution exceptionnelle de cette équipe au rayonnement de l’expertise trifluvienne.
« Phuong fait partie de nos chercheurs les plus prolifiques. C’est aussi un rassembleur ; il a su s’entourer de professeurs et d’étudiants aux cycles supérieurs talentueux, qui profitent des forces de chacun pour repousser leurs limites. Cette dynamique de groupe propice à l’innovation ouvre la voie à des résultats concrets, qui positionnent avantageusement l’UQTR dans l’écosystème de la recherche et du développement », conclut M. Millaire.