Depuis 2008, des chercheurs travaillent à dresser le portrait des eaux souterraines à travers le Québec. Les données recueillies permettront notamment aux intervenants du milieu de mieux gérer et protéger cette ressource. Pour aider ces gestionnaires à comprendre et utiliser les connaissances générées par les scientifiques, plusieurs ateliers leur sont offerts. Ces activités, réunissant chercheurs et intervenants, ont été organisées grâce à l’expertise, entre autres, de la professeure Julie Ruiz, codirectrice du Centre de recherche sur les interactions bassins versants – écosystèmes aquatiques (RIVE) et membre du Département des sciences de l’environnement de l’UQTR.
« L’eau souterraine est une ressource complexe à gérer parce qu’on ne la voit pas. Protéger cette ressource représente donc un défi pour les intervenants du milieu, d’autant qu’ils ne sont pas des spécialistes des eaux souterraines. Il faut donc leur transmettre les connaissances issues du travail des scientifiques et leur en faciliter l’utilisation », précise la professeure Ruiz.
La chercheuse et son équipe ont rencontré des professionnels responsables de la gestion des eaux souterraines afin de répertorier leurs besoins, leurs questions et leurs difficultés à s’approprier les connaissances nécessaires pour faire leur travail. Sur la base de ces constats, une stratégie de transfert de connaissances entre chercheurs et professionnels a été mise sur pied, en collaboration avec le Réseau québécois sur les eaux souterraines.
« De 2014 à 2018, des ateliers ont été offerts dans 13 régions du Québec à près de 460 gestionnaires des eaux souterraines œuvrant au sein d’organismes gouvernementaux et d’aménagement du territoire. Outre le transfert de connaissances, ces ateliers ont aussi permis de tisser des liens féconds entre les scientifiques et les professionnels, établissant ainsi un réseau de travail à long terme profitable pour toutes les parties », rapporte la chercheuse.
Ces ateliers ont notamment permis aux gestionnaires d’acquérir le vocabulaire utilisé en hydrogéologie, de découvrir le fonctionnement des eaux souterraines de leur région et d’analyser les données recueillies sur le terrain, en compagnie des chercheurs. Plusieurs questions ont aussi été explorées : où est l’eau potable dans notre région? où installer une source polluante sans risque de contamination? comment protéger les zones de recharge des eaux souterraines?
Les participants à ces ateliers ont pu aussi établir les rôles et responsabilités des différents intervenants régionaux relativement à la gestion des eaux souterraines. Ils ont également travaillé à la mise en place de mesures de protection de la ressource d’eau souterraine sur leur territoire.
Le projet se poursuit
Récemment, la professeure Julie Ruiz et son équipe ont obtenu une subvention de 520 000 $ du gouvernement du Québec – en lien avec la mise en œuvre de la Stratégie québécoise de l’eau 2018-2030 – pour poursuivre l’offre d’ateliers aux gestionnaires des eaux souterraines jusqu’en 2022.
« Le projet s’est toutefois un peu modifié parce que nous allons offrir des ateliers dans des régions où le portrait des eaux souterraines n’a pas encore été réalisé par les chercheurs. Nous avons donc remodelé les ateliers afin que les gestionnaires participants puissent d’abord acquérir des connaissances sur l’hydrogéologie et rencontrer les scientifiques. Ces derniers pourront ainsi en apprendre davantage sur les caractéristiques du territoire et en tenir compte lors de la cueillette des données sur les eaux souterraines. Ensuite, au fur et à mesure que ces données seront obtenues, les gestionnaires pourront se les approprier », explique la professeure Ruiz.
Les ateliers – une vingtaine en tout – seront offerts à plus de 150 participants dans les régions des Laurentides, de Lanaudière, de l’est de la Mauricie et La Tuque, de l’ouest du Bas-Saint-Laurent et de l’Estrie.
« Jusqu’à présent, les ateliers semblent très appréciés par les participants, constate Julie Ruiz. Les chercheurs disent mieux comprendre la réalité des intervenants du milieu. Ils constatent aussi que ces activités stimulent l’utilisation des données scientifiques par les gestionnaires. Ceux-ci, pour leur part, aiment travailler sur leur propre réalité territoriale et discuter avec les experts scientifiques lors des ateliers. »
Protéger la ressource
Les activités organisées par la professeure Ruiz et son équipe contribuent à mieux outiller les intervenants du milieu pour la protection des eaux souterraines, lesquelles constituent la source d’alimentation en eau potable de plus de 20 % de la population québécoise. En participant aux ateliers, les gestionnaires sont davantage en mesure de limiter les risques liés à la contamination ou à la surexploitation de cette ressource.
Les intervenants améliorent aussi leurs compétences pour la mise en place de mesures d’adaptation aux perturbations liées aux changements climatiques (sécheresses, inondations, etc.). Les ateliers leur apprennent également à intégrer la ressource d’eau souterraine dans l’aménagement de leur territoire ainsi qu’à réfléchir à l’instauration de mesures coordonnées entre tous les intervenants de leur région.