La dernière année a été fort occupée pour les chercheurs du Centre interordres de recherche et de transfert en manufacturier intelligent (CIRT-MI). Après avoir créé leur centre d’innovation, les membres ont procédé à la nomination d’une triple direction scientifique, qui a mené de front le développement de projets majeurs potentiels avec des partenaires régionaux. Si la genèse de ce centre s’est faite sans bruit, le CIRT-MI connaît aujourd’hui une envolée fulgurante.
« Depuis la fin des années 1990, il y avait des discussions entre la Chambre de commerce et d’industrie de Drummond, la Société de développement économique de Drummondville et la Ville de Drummondville au sujet des besoins en recherche des entreprises. Ces discussions ont débouché sur un projet interordres de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) et du Cégep de Drummondville, qui ont créé le Centre national intégré du manufacturier intelligent (CNIMI). Et le CIRT-MI, c’est l’organe de l’UQTR qui, à travers le CNIMI, met la recherche au service de l’industrie », explique Marc-André Gaudreau, professeur au Département de génie mécanique de l’UQTR.
Grâce à son approche transdisciplinaire, le CIRT-MI a la capacité d’accompagner les entreprises dans la gestion de l’ensemble des étapes de leur transformation numérique. Sa programmation de recherche, qui se décline en cinq axes, a été élaborée pour répondre aux besoins des entreprises.
- Stratégies et approche pour la transition numérique des PME manufacturières québécoises
- Intégration des systèmes et numérisation manufacturière
- Fabrication additive et intelligente
- Systèmes cyberphysiques autonomes
- Gestion des opérations, de la logistique et l’aide à la décision
Les membres du CIRT-MI, qui sont issus tant du Cégep de Drummondville que de l’UQTR, possèdent un éventail d’expertises dans les différents domaines du génie et de la gestion. Ce caractère multidisciplinaire permet aux étudiants-chercheurs, aux travailleurs et à la communauté d’avoir des perspectives nouvelles sur l’écosystème manufacturier.
« Notre approche en innovation 4.0 nous permet de couvrir un spectre très large. Nous n’offrons pas de solutions à la pièce ; nous offrons une vision globale qui tient compte de toute la chaîne d’innovation autour de l’humain. C’est ce qui nous distingue des autres. Nous travaillons en équipe pour mobiliser les outils de la recherche et du transfert, afin de répondre aux besoins des entreprises », affirme Sousso Kelouwani, professeur au Département de génie mécanique de l’UQTR.
« C’est certain que le démarrage d’un tel centre comporte son lot de défis. Ceci étant dit, nous avons l’ambition de nous faire les porteurs d’une mission nationale. Notre expertise peut être utile à l’ensemble des manufacturiers du Québec, pas seulement à ceux de la périphérie de Drummondville. Bien sûr, le CIRT-MI a une saveur régionale, puisque sa direction et ses membres sont répartis de part et d’autre du pont Laviolette, en Mauricie et au Centre-du-Québec. Mais ultimement, nous sommes au service de l’ensemble de la communauté », ajoute-t-il.
Un effort de sensibilisation
La première étape de démarrage du CIRT-MI a consisté en l’embauche de ressources pouvant répondre aux besoins de l’industrie manufacturière. Au cours de la dernière année, ces personnes ont aidé des entreprises à faire face à des enjeux d’intelligence manufacturière. Comme la croissance du centre d’innovation laisse présager de nouveaux projets, comme la numérisation de solutions industrielles, sa direction prévoit embaucher des ressources supplémentaires. Entre-temps, l’équipe du CIRT-MI poursuit un effort de sensibilisation auprès de ses partenaires.
« Les outils connectés, comme l’assistant Google ou Alexa, ont recours à l’intelligence artificielle pour aider les gens à effectuer différentes tâches quotidiennes. Il existe un pendant industriel à ces technologies, mais les entreprises hésitent encore à y recourir en raison du risque et de l’investissement que cela représente. Le directeur technique, qui s’occupe de la portion plancher de l’entreprise, va souvent être plus sensible aux avantages procurés par ces technologies. Or, la transformation numérique ne peut pas réussir sur la seule base de l’aspect technique. L’efficacité de ces outils dépend de la capacité de la haute direction à gérer et à adapter le modèle d’entreprise », indique Laurent Cormier, professeur au Département de génie mécanique de l’UQTR.
« C’est effectivement auprès des gestionnaires que nous devons fournir le plus d’efforts pour faire accepter nos idées. Ils sont souvent capables de reconnaître qu’ils ont un besoin, mais la plupart du temps, ils comprennent mal ce besoin. Plusieurs entreprises entreprennent des transformations superficielles, sur la base de mauvaises raisons. Notre rôle est de transmettre une vision complète pour leur permettre d’entreprendre une transformation en profondeur », renchérit M. Gaudreau.
Un rôle distinct
Le CNIMI offre un accompagnement à une variété de partenaires : des étudiants voulant se préparer pour le marché du travail, des travailleurs en quête de formation, et des gestionnaires désireux de se mettre à jour. Pour répondre à ces différents publics, le CNIMI a instauré différents guichets, qui partagent néanmoins une mission, une vision et des ressources. Parmi les quatre centres regroupés sous l’enseigne du CNIMI, deux d’entre eux, le CIRT-MI et le Centre d’excellence en productivité manufacturière, ont le mandat d’assister les entreprises. Leur vocation est toutefois différente.
« Le Centre d’excellence en productivité manufacturière assure le lien direct avec l’industrie, et se concentre surtout sur des questions entourant l’implantation de technologies. Du côté du CIRT-MI, nous proposons des solutions adaptées en fonction du degré de maturité numérique de l’entreprise. Autrement dit, même si les problématiques identifiées cachent des failles plus fondamentales, nous sommes en mesure de soutenir l’entreprise », remarque M. Gaudreau.
« Le Centre d’excellence possède l’expertise pour aborder les enjeux de transformation numérique communs au sein de l’industrie. Or, l’analyse révèle parfois des besoins plus approfondis, pour lesquels l’intégration de solutions rencontre des obstacles. À ce moment-là, le CIRT-MI peut prendre la relève en mobilisant ses compétences en recherche et en innovation », complète M. Cormier.
Trois têtes valent mieux qu’une
Devant le défi colossal que représentait le démarrage d’un centre d’innovation, les trois professeurs ont décidé de joindre leurs forces pour former la direction scientifique du CIRT-MI. Bien que ce modèle de gestion ne soit pas conventionnel, les résultats qu’ils ont obtenus jusqu’ici laissent entrevoir un avenir prometteur.
Recruté en 2017 pour démarrer le programme de génie mécanique au campus de Drummondville, Marc-André Gaudreau est titulaire de la chaire ULIM en intelligence manufacturière. Sa spécialité est la vibroacoustique et les systèmes dynamiques, mais il s’est intéressé, dès les premiers balbutiements à la 4e révolution industrielle et à ces enjeux de recherche. Fort d’une expérience d’une vingtaine d’années en industrie et en enseignement collégial avant sa carrière universitaire, il a su développer au cours des années un réseau d’entreprises qui contribuent au succès du nouveau programme. Il est aussi l’instigateur de l’approche DUAL, qui permet aux étudiants de poursuivre un cheminement en alternance travail-études axé sur le manufacturier intelligent.
Professeur à l’UQTR depuis 2019, Laurent Cormier possède une riche expérience en recherche et en innovation. Il est issu de l’École de technologie supérieure (ÉTS), où il a complété son doctorat et son stage postdoctoral, et où il a débuté sa carrière en enseignement et en recherche. Il s’intéresse à la caractérisation du comportement à long terme et à la fabrication des matériaux polymères et de leurs composites, principalement dans les secteurs du transport et des infrastructures. Il a aussi développé une expertise sur les procédés novateurs pour la mise en forme de condensateurs haute tension. Dans le programme de baccalauréat en génie mécanique offert au campus de Drummondville, il agit comme référence en matière de procédés de fabrication.
Sousso Kelouwani enseigne la mécatronique depuis 2012. Il est titulaire de la Chaire de recherche du Canada en optimisation énergétique des systèmes de transport intelligent, ainsi que de la Chaire de recherche Noovelia pour la navigation intelligente des véhicules industriels autonomes. Il s’intéresse aux techniques d’aide à la conduite, à la navigation écoénergétique des véhicules autonomes, et à l’hybridation des sources d’énergie pour les véhicules. Il collabore avec plusieurs entreprises canadiennes dans le domaine du transport pour le développement des véhicules intelligents et sans conducteur.