La statistique frappe : 32 % des adultes canadiens auraient été victimes d’abus ou de négligence durant leur enfance. Aujourd’hui futurs parents, est-ce que le fait d’avoir subi de la maltraitance aura des répercussions psychosociales, voire même laisser une empreinte biologique sur leur propre enfant ?
« Le phénomène de l’abus et la négligence durant l’enfance peut effectivement avoir une portée intergénérationnelle. Les enfants nés de parents ayant été maltraités durant leur jeunesse pourraient développer des problèmes neurobiologiques, affectifs et cognitifs précoces, en plus d’être trois fois plus à risque de subir de la maltraitance par rapport à leurs pairs », affirme Roxanne Lemieux, professeure au Département de sciences infirmières de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR).
Elle poursuit : « Un courant de recherche plus récent suggère que les mères ayant subi de mauvais traitements dans leur jeunesse encourent un risque accru de présenter des anomalies dans leurs mécanismes biologiques de régulation du stress et leur système immunitaire. Ces altérations biologiques sont un facteur de risque pour le développement neurobiologique de l’enfant. »
Pour mieux comprendre ce phénomène, qui est considéré comme un réel problème de santé publique, et y trouver des solutions concrètes en ciblant l’intervention prénatale, l’équipe de recherche de Roxanne Lemieux peut compter sur une subvention de 250 000 $ sur 2 ans, octroyée par le Comité de coordination de la recherche au Canada (CCRC) dans le cadre du volet Exploration du Fonds Nouvelles frontières en recherche.
« Nous avons développé une intervention prénatale pour les femmes ayant été exposées à de la maltraitance en bas âge, en vue d’interrompre le processus de transmission intergénérationnelle du risque lié aux traumatismes qu’elles ont vécus », soutient la chercheuse de l’UQTR, qui travaille également à mettre en place des pratiques sensibles aux traumatismes dans le contexte des soins périnataux pour aider les futures mères ayant vécu des agressions sexuelles.
Le projet de recherche s’inscrit dans le cadre du Programme STEP (Soutenir la transition et l’engagement dans la parentalité), développé par l’équipe de Roxanne Lemieux et de son collègue Nicolas Berthelot, dont l’objectif vise à favoriser la santé physique et mentale des adultes ayant subi des traumatismes durant leur enfance, à soutenir le développement psychosocial de leur enfant et à interrompre les cycles intergénérationnels de maltraitance.
« L’étude longitudinale que nous mènerons permettra donc d’évaluer l’efficacité d’un programme psychosocial à réduire les effets biologiques négatifs associés aux mauvais traitements vécus par les mères, chez celles-ci et leur enfant », explique-t-elle.
Équipe de recherche
Pour y arriver, Roxanne Lemieux peut compter sur une équipe de recherche multidisciplinaire, composée de Nicolas Berthelot (sciences infirmières, UQTR), Michel Maziade (psychiatrie, Université Laval), Isabelle St-Amour (biologie cellulaire, coordonnatrice CERVO), Evelyne Touchette (psychoéducation, UQTR), Carl Lacharité (psychologie, UQTR), ainsi que plusieurs étudiants-chercheurs.
Fonds Nouvelles frontières en recherche du CCRC
Les subventions accordées par le CCRC en vertu du volet Exploration, l’un des trois volets du Fonds Nouvelles frontières en recherche, permettent aux chercheurs de travailler ensemble à trouver des solutions aux problèmes les plus urgents de notre monde.