La nature, le plein air : on en connaît tous les bienfaits sur le corps et l’esprit. Et si ces bienfaits pouvaient être mis à profit pour l’éducation et le développement des enfants ? « Le plein air devient alors un motif pour avoir du plaisir, certes, mais aussi pour initier des apprentissages, développer ses compétences et son autonomie, et ouvrir sa conscience environnementale », lance Élisabeth Lavallée, diplômée de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) à la maîtrise en sciences de l’activité physique.
Elle ajoute : « Cette idée de l’éducation expériencielle en plein air vise à rendre accessible la nature dans la perspective du développement de l’enfant, à combiner le plaisir avec l’apprentissage. » La jeune chercheuse a d’ailleurs fait de cette approche le thème de son projet de maîtrise, dont l’objectif consiste à examiner l’évolution de la perception des membres du personnel scolaire et des parents par rapport à la pédagogie « Enfant Nature » au préscolaire.
« Nous avons voulu comprendre les processus d’implantation et évaluer les effets d’une approche développée par la Coopérative Enfant Nature de Shawinigan », précise Élisabeth, dont l’intérêt pour le développement de l’enfant, l’activité physique et la nature ne se dément pas.
Sa rencontre avec les professeurs Marie-Claude Rivard et Claude Dugas du Département des sciences de l’activité physique de l’UQTR, « un vrai coup de cœur » pour l’étudiante, lui a permis de lancer son projet de recherche. D’ailleurs, le Département des sciences de l’activité physique collabore depuis 2015 avec la Coopérative Enfant nature et sa fondatrice, Sylvie Gervais.
L’approche Enfant nature
Cette approche éducative expérientielle en plein air s’inscrit dans un mouvement culturel et éducatif en milieu naturel. Elle s’inspire du modèle « Forest School » des pays scandinaves, où l’éducation et la santé sont reliées à l’importance d’être et d’apprendre avec la nature dans l’optique de favoriser le développement global, les saines habitudes de vie et la réussite éducative des enfants.
« Il s’agit donc de développer l’habitude des enfants d’être en nature, d’utiliser les ressources naturelles comme matériel pédagogique, de multiplier les occasions de jeu libre en plein air. L’approche s’appuie sur le principe que chaque enfant est unique et compétent, qu’ils sont des apprenants actifs et ont besoin d’expériences de la vie réelle », explique Élisabeth, qui poursuit aujourd’hui des études doctorales en sciences biomédicales à l’UQTR.
Pour contrer le « déficit nature » observé chez les enfants d’ici, la Coopérative Enfant Nature a élaboré une nouvelle approche éducative expérientielle en plein air : la pédagogie Enfant Nature. L’approche est adaptée à la culture et aux valeurs québécoises tout en répondant aux exigences des programmes ministériels. « En parallèle, les enseignantes et les éducateurs ont été consultés pour que l’approche et le matériel pédagogique soient adaptés à leur réalité », ajoute-t-elle.
Le modèle d’intervention est constituée de cinq clés d’apprentissage, liées aux compétences visées par le Programme de formation de l’école québécoise du Ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur de Québec. Celles-ci permettent d’orienter les activités éducatives afin de solliciter toutes les sphères du développement de l’enfant : physique et motrice, cognitive, affective, sociale et langagière.
Effets bénéfiques
Le projet de recherche d’Élisabeth consistait donc à évaluer la perception des membres du personnel scolaire et des parents, avant et après une année de classe durant laquelle les enfants d’un groupe prématernelle de 4 ans ont bénéficié de l’approche Enfant Nature, à raison de 6 h consécutives à l’extérieur chaque mercredi.
« Pour le personnel scolaire, ce fut définitivement une nouvelle manière d’enseigner, une façon de sortir de sa zone de confort et d’intervenir autrement auprès des enfants. Par ailleurs, on note que la formation et le soutien professionnel en pédagogie Enfant Nature sont importants pour l’implantation de l’approche dans tout milieu scolaire », soutient Élisabeth. Du côté des parents, la perception est positive : c’est vu comme un moyen de faciliter l’intégration des enfants à l’école, notamment en raison de la variété des activités éducatives proposées en nature.
Selon la jeune chercheuse, « les résultats démontrent le grand potentiel des milieux extérieurs dans le soutien à l’apprentissage et les bienfaits que ce type d’approche peut engendrer sur les différentes sphères développementales des enfants. Autant les parents que le personnel scolaire ont remarqué des effets bénéfiques sur le niveau et l’intensité d’activité physique, les habiletés motrices et la capacité de résolution de problèmes. On observe aussi une propension plus grande à l’entraide et la coopération, ainsi qu’une augmentation de la confiance en soi et de l’autonomie. Et c’est sans parler d’une meilleure connaissance de la faune et la flore ».
Au-delà de l’école, l’enfant peut aussi devenir un agent influenceur dans sa famille. « L’approche Enfant Nature leur donne le goût de retourner à l’extérieur pour montrer à leurs parents ce qu’ils ont appris. Cela contribue à créer une culture de plein air et une volonté de protéger la nature, à réduire le temps sédentaire en plus de passer des beaux moments en famille », conclut Élisabeth Lavallée.